Le « design empathique » aide à construire des produits que les gens aiment
« Le design thinking correspond à une approche de l’innovation centrée sur l’humain par laquelle le designer intègre les besoins des utilisateurs, les possibilités technologiques et les exigences liées au succès d’une entreprise. » (Tim Brown, PDG chez IDEO; notre traduction).
Il existe 2 moyens bien connus d’utiliser le design thinking pour créer des produits et services de qualité : (1) employer des utilisateurs-designer qui représentent les utilisateurs et (2) utiliser la recherche ethnographique (une méthode propre à l’anthropologie) de façon à se mettre à la place des utilisateurs finaux.
Des recherches récentes ayant pour objet les grands bureaux d’architectes mettent en évidence 3 autres approches de design thinking qui mettent de l’avant des méthodes de design empathique. C’est à ces techniques novatrices de design que nous nous intéressons aujourd’hui.
Adopter temporairement le rôle d’un utilisateur
La première méthode consiste à adopter temporairement le rôle d’un utilisateur. Le fait d’adopter temporairement le rôle d’un utilisateur permet de mieux comprendre les points de blocage liés au parcours de l’utilisateur. À titre d’exemple, un designer souhaitant comprendre l’expérience d’un patient et de sa famille pourrait feindre une blessure dans une salle d’urgence. Ce type d’expérience pourrait ainsi permettre d’identifier le besoin de revoir les process de tri mis en œuvre par les infirmières à l’accueil.
S’immerger dans la culture du consommateur
Une autre technique de design empathique consiste à s’immerger dans la culture du consommateur ou du client de façon à cerner les difficultés qu’ils rencontrent à travers une perspective qui se rapproche de celle du consommateur. Un exemple qui illustre bien cette méthode est le travail réalisé par une architecte renomme de la firme HGA. Cette architecte s’est vue confié un travail d’avant-vente pour un projet de synagogue. Dès l’annonce du projet elle s’est immédiatement lancée dans une étude de la culture juive. Au moment de son entretien avec son client potentiel, l’architecte avait tellement bien approfondi le sujet que le client avait suggéré, blaguant à peine, qu’elle pourrait enseigner le judaïsme dans une école hébraïque. Grâce à son étude de la culture juive, l’architecte avait compris l’importance de la terre promise dans la culture juive. C’est ce qui l’a amené à mettre de l’avant un élément qui n’avait pas été considéré par les autres firmes d’architectes en liste pour ce projet : l’aménagement d’un petit jardin utilisé pour certaines cérémonies. Cette petite attention qui témoigne de sa sensibilité et de son empathie à l’égard de son client lui a permis de remporter cet appel à projets.
Utiliser des artéfacts cognitifs
Enfin, une autre façon de mettre en œuvre le design empathique consiste à utiliser des artéfacts cognitifs qui permettent de rehausser un prototype physique. De la même façon qu’un dessin ou une maquette puisent dans l’imagination, les métaphores ou les analogies évocatrices révèlent des désirs latents des utilisateurs. À titre d’exemple, lorsque la firme d’architecte SMMA a reçu comme mission de réaliser un espace de créativité favorisant la collaboration et la libre circulation des idées, le directeur du design de SMMA a suggéré d’utiliser un séchoir à tabac comme archétype conceptuel. Ce type de structure est liée à la terre et conçu pour un process particulier, orientant la circulation de l’air. En invitant chacun à réfléchir à des fonctionnalités qui pourraient imiter ou différer de cet archétype, SMMA a abouti à un design plus innovant, empathique et convivial pour son espace de créativité.
Conclusion
En résumé, il existe plusieurs façons de faire du design empathique. Ces techniques ont en commun certains aspects. Elles mettent l’accent sur les besoins et désirs qui ne sont pas formulés explicitement, et ce, de manière créative. Elles regardent les problèmes en adoptant la perspective de l’utilisateur ou du client. Et enfin, elles permettent une « connexion émotionnelle » entre le design et les utilisateurs. À chaque fois, les designers utilisent des stratégies leur permettant d’entrer dans l’esprit de leurs clients et ultimement des utilisateurs finaux. C’est là que réside la clef de leur succès.
Cet article est inspiré d’un article de Dorothy Leonard, professeur émérite à l’école de commerce de Harvard et publié dans la revue Harvard Business Review.